martes, 6 de abril de 2010

LAS FALLAS de VALENCIA 2010 par JEAN CLAUDE LORANT RAZE

2010 Fallas.
Les marchands de beignets , buñuelos et churros, entreprennent la conquête des trottoirs, les casetas celle des rues ici et là, quelques pétards isolés ivres de liberté s’explosent à l’avance alors que leurs grands frères illustrent la mi journée (ici 14h) lors de la mascletà, Patrimoine de l’Humanité valencienne. Robes et costumes ont quitté leurs naphtaline, les artistes falleros mettent la dernière main à leur œuvre fugitive : bref, la crise se montre apparemment inefficace contre la tradition. Les avions vont se vider, les hôtels se remplir et plusieurs centaines de milliers de personnes entre acteurs et spectateurs s’exposeront, admireront la profusion des richesses vestimentaires, les bouquets de fleurs en honneur à la Mare de Deu, vierge patronne de la ville. La plaza de toros, coso del pasaje de Jativa ou encore coso de Monleon (l’architecte) plus que centenaire se refait une beauté avant les grands travaux qui la moderniseront pour les Festivités 2011. Il s’agit aussi d’accueillir dignement l'équipe de Mr Simon Casas, le nouveau maître de céans, un Français qui revient plein d'usage après un long voyage.
Les premières clarines 2010, le 11 mars, ouvrirent les portes des corrales à des produits de Torres Gallego à l’irréprochable présentation mais qui faibles, sans intérêt. Alejandro Espla fit preuve de pugnacité, d’ardeur sans mesure , en pure perte : quelle malchance s’acharne donc sur ce garçon à qui en outre on ne pardonne pas, semble-t-il, d’être fils de son père, LM Casarès et Arevalo pas mieux lotis, ne firent pas mieux, eux multiplient les contrats.
Une demi entée seulement le lendemain pour les remarquables taureaux authentiques de Mr Adolfo Martin : sérieux, défenses effilées, spectaculaires, durs, acides, très attentifs aux hommes voire compliqués. Face à eux, foin de vedettes mais des artisans de grande qualité, des toreros qui ne trompent pas : José Luis Moreno et José Calvo, tous deux ovationnés et qu’on peut engager partout, quel que soit l’adversaire. Ils officient avec bon goût, classe : si José n’avait échoué avec l’épée je parlerais de triomphe. El Califa , le disparu, eut l’immense mérite de faire face, et ce n’était pas rien.

Tout comme Juan Bautista ! Les statistiques ne retiendront que le trophée cédé par Carasucia, un Fraile pas très évident, et pourtant l'Arlésien enthousiasma les gradins avec le précédent. Bien que tuant, malencontreusement, d’une estocade basse, en grande majorité les flammes blanches sollicitèrent l’oreille. Étrange sens de la démocratie que celui de ce président , dont on ne donne pas le nom, ici mais qui opta plus tard pour d'autres décisions. JB eut à dépêcher le dernier animal, Guerrita, suite à la blessure impressionnante qu’il infligea à Miguel Tendero, auteur d’une première prestation fort intéressante, hélas trahie par l’épée. Le Mexicain Arturo Macias, tout auréolé de ses succès américains, coupa lui aussi une oreille pour la seconde faena, conclue après une cogida spectaculaire lui valant j’imagine le bon cœur des gradins: volontaire, engagée, vaillante mais souvent accrochée sa muleta eût gagné aux calme et sérénité.

Dimanche 14, l'aficionado eut bien l'impression que le changement de gestion des arènes ne changeait pas grand chose au niveau des taureaux. Foin des Palmosillas annoncés mais un bouquet d'élevages (appartenant à El Niño de la Capea) : quatre au fer de Carmen Lorenzo, un San Pelayo, un San Mateo plus un remplaçant de Yerbabuena. Présentation et prestations aussi inégales...et ¾ d'arène pour assister, comme à Castellon, à la concession de trophées après de bien tristes estocades. El Fandi, (o et o) conjugua poses de banderilles à dos passés après des courses effrénées qui laisseraient pantois un athlète jamaïcain: si la pérennité de la tauromachie doit passer par là! Le lot del Cordobès fut si terne, si sec qu'il ne lui permit pas de sortir son costume de batracien. Jesulin, en dépit d'un premier ruminant accessible, se montra comme perdu, sans attrait, inquiet: aîe, aïe, aïe!

Contrairement à la veille il y eut un originel et authentique triomphateur du cycle 2010: César Jimenez (O et O). Une faena vibrante débutée au centre, à genoux, une muleta rythmée, une fin de prestation enlevée mais à l'esthétisme préservé, un avis(les deux héros prenaient plaisir à la rencontre), une estocade, irrémédiable, enfin et le tour était joué! L'autre, Limpiabotas (avec un nom pareil comment avoir confiance, encore que dans ce monde-là...) n'inspirait confiance à personne après avoir subi la première pique puis s'être échappé de la seconde mais César savait. Surpris qu'on lui fit confiance le taureau se releva plus vite, peu à peu la boiterie s'estompa avant de disparaître. Ô miracle cette sorte de Lazare s'élança pour quelques naturelles citées et données de face, d'autres si libérées, comme négligées (chose improbable chez César) que les gradins ne furent plus qu'olés.Terrible entière, appendice: un, comme la veille. Matìas Tejela (ovation et silence) semble encore en rodage. Certes les fondamentaux sont là: élégance, autorité, muleta apte à bien rythmer les rencontres, peut-être un peu trop 78 tours (pour ceux qui ont connu cire et vinyle) quand on espérait les 45. Luis Bolivar (ovation, applaudissements) et ses cambiadas à la mode mais si authentiques. Luis le solide était sur le point de convaincre lorsqu'une méchante estocade au-dessus de l'épaule...Bonne prestation et présentation des Fuente Ymbro, convenablement armés, avec ce qu'il fallait de piquant pour satisfaire les publics.

20 Ans d'alternative, on allait célébrer l'enfant du pays, d'éloges en louanges et dithyrambes les presses, (qui ne connaissaient pas les malheurs de Perette et de son pot à lait) y compris le très sérieux El Mundo nous comptaient à l'avance le scénario de la journée, le brindis du premier taureau au grand-père à qui il doit tout etc... c'était sans compter avec les taureaux de la marque Zalduendo , en général bonasses mais las des humiliations vécues en deux décades. Ils avaient bien préparé leur coup les bougres, les deux premiers se sacrifièrent et laissèrent Enriquet, comme on dit ici, déployer son habituelle tauromachie parfaite adaptée à des animaux ...adaptés qu'un matador débutant aurait plaisir à rencontrer. Détachement, abandon apparent, faena mille sept cent fois reprise c'est dire la perfection de la prestation, la presque perfection puisque les deux premiers rounds ne récoltaient qu'une petite oreille et une vuelta à la Louis le Quatorzième. On sentait bien que les choses n'allaient pas comme prévu alors que le bel Osiris fit son apparition en piste Dieu du Bien et de la Végétation, mais aussi de la vie éternelle qu'il entendit précipiter: il contraignit le maestro à plier puis, désarmé, à fuir par dessus des barrières. Tête désordonnée, refus de tout, agressif Osiris fut tout ce que les soi-disant figuras dédaignent ...et c'est à partir de là qu'Enrique Ponce fut grand, immense même s'il abandonna la gestion du tercio de banderilles à une cuadrilla désorientée. Passes de châtiment exposées pour un combat homérique: muleta accrochée à droite qui part à gauche pour y subir le même sort, muleta qui revient et puis retourne mais petit à petit avec davantage d'autorité, de sûreté, les gradins stupéfaits retrouvent de la voix. Probablement fatigué Ponce tua mal : deux estocades dont une dans l'épaule, des descabellos. Peu importait, Enrique n'avait pas fait que triompher, il venait de montrer à tous qu'un Maestro digne de ce nom, apte à tout, peut tout. Quel dommage qu'avec la demi-douzaine de ses habituels collègues huppés il ne se commette jamais avec des élevages produisant du véritable taureau de combat. Ne serait-ce pas là un moyen de sauver la corrida, au moins de faire taire bien des contradicteurs? Bien mieux, je l'assure, que de produire des mollassons sur anoblis dont on se préoccupe surtout de la pointe des cornes. Le Juli, compagnon du jour, dédia le dernier Zalduendo ,Magistrado, à son collègue, le félicitant j'imagine pour son cran et son talent. Deux appendices vinrent s'ajouter aux deux premiers récoltés à l'issue de sa première prestation: Juli fit tout, fut tout, non pas seulement le torero tout-terrain que sa jeune science développe à satiété au bras d'une intraitable autorité (voir les sèches trincheras de rappels à l'ordre), mais on le sentait heureux, quand, au centre de la piste, il lançait les pas de deux, il tua al recibir, offrit un quite aérien et lumineux dans les projecteurs comme pour consoler les masses poncistes conquises qui lui avaient ouvert leurs bras.
Ce mardi 16 mars, à 15h30, on enterra un poète en France du sud: Juli, Ponce, après une telle corrida , présomptueusement je vous dédie son Que c'est beau la vie.

La corrida d''Alcurrucen, bien présentée et armée, déçut probablement ...les amoureux du taureau bonbon, le second, manso, fut l'objet de toutes les attentions de Daniel Luque( en pure perte) jusqu'à mi faena où le jeune homme put enfin lier quelques muletazos. Si la patience est bonne conseillère, par ses excès elle suscite souvent le drame: Daniel, surpris à la sortie d'une banale naturelle et sérieusement touché au mollet n'en termina pas moins la besogne: ovationné il rejoignit l'équipe médicale du Pr Zaragoza qui attendait le quatrième blessé de la feria. Ruben Pinar (O) continue son bonhomme de chemin: s' il ne put rien arracher au premier qui ne voulut rien lâcher, il sut mettre à profit l'entrain d'Afectìsimo, un grand galopeur pour les prairies éternelles avec un labeur au son de la vivacité dans un tourbillon coquelicot enthousiaste et salué . El Cid revint lui aussi de l'infirmerie ( front entaillé) pour assumer ses fonctions de chef de lidia: il ne fut pas plus heureux avec le retors Dominico qui savait bien que la sociabilité, comme une qualité, peut-être une faiblesse.

Fallait-il attendre autre chose des J P Domecq associés aux artistes(?) dont les plumitifs thuriféraires exaltent les vertus passagères pour attirer des chalands fiers de ses considérer distingués parce qu'ils savent que je ne sais où, je ne sais quand... Cayetano, montra qu'il ne se veut pas seulement cible consentante des groupies ou mannequin de luxe chez Armani ,bien que la démarche,. S' il tua mal il s'efforça de toréer vraiment, fut soulevé et piétiné mais revint. A noter que toutes les cuadrillas intervinrent, que Julio, s'il arriva le dernier, arriva quand même: un seul resta au chaud derrière derrière les barrières! Aparicio tua bien mal lui aussi, pour toutes les bonnes raisons qu'on voudra bien donner, le peu qu'il fit, même bien, manquait de transmission. Il économisa les énergies animales, ce qui constitue peut-être les préliminaires de la fin de la tauromachie et s'en fut. Heureux?? Morante de la Puebla sait au moins faire parler de lui: après de lamentables pantalonnades rien ne vaut une belle et sonore et longue bronca pour faire rougir les plumes. Comme dit le chroniqueur Sebastian Perret ''Pepito'', entre inspiration et aspiration (vers l'extérieur) ...Un artiste, messieurs n'expose pas ses œuvres bâclées, il déchire ou détruit au plus tôt ce qui, autrement, le déshonorerait.

Après le 18 vient le 19, comme partout direz-vous, mais ici ce n'est pas partout, 19 mars c'est San José, sans ce Joseph patron des charpentiers et autres artisans du bois, point de fallas, point de corrida point de rien. Par tradition on donne, entendre on vend une matinale corrida de rejones fort suivie. La série 2010 le fut moins, faute de Mendoza, Ventura ou Cartagena il est vrai. Braves, mobiles, bien présentés les taureaux de San Pelayo , à ne pas confondre avec Pelayo inventeur de l'Intifada qui repoussa, en Asturies, les envahisseurs à force coups jets de pierres. Rui Fernandez (O-O), L. Hernandez (O, forte pétition de l'autre) Lupi (O) et Galan (O) se partagèrent le magot, seul Antonio Domecq s'en fut la gibecière vide.
L'après midi, excepté Pantomima, le quatrième, contesté, bien présentés les médiocres taureaux de Victoriano del Rìo déçurent plus les toreros que les inconditionnels d'Enrique Ponce. Sous le regard des 97 fallas du grand-père (à qui, dit-il, il doit tout) Enrique récolta un pavillon, douteux, de Sinvaina, manso coureur, faible, qu'il parvint à maintenir debout jusqu'à une estocade dans le rincòn de qui vous savez. Le quatrième aurait pu se dispenser de sortir de l'ombre où il était à sa place (silence). J.MManzanares offrit quelques séquence de première classe, suaves, mais à ses prestations il manqua des émotions, de l'émotion: première ovation après une basse estocade sanglante, mais c'est une épée canon que salua la seconde . Traquenard? Un peu fort. Incompétence? Je ne pense pas. Curieux sens de l'arithmétique, probablement. Monsieur, ½ +1 sont la définition de la majorité absolue par rapport à la relative, plus encore lors d'une faena à un tour. Le peuple d'arène ne pouvait rien pour se défendre, for l'honneur, et celui de vous adresser, Monsieurle Président, La bronca. Non pas n'importe laquelle mais une qui se tend, se détend puis reprend, souffle pour mieux gonder : Castella (ovation et ovation)venait de pourfendre Gavilòn d'un tel coup de rapière que le sol en tremble encore. Le taureau n'avait pas grand-chose, Sébastien lui inventa du fonds, s'offrit aux faiblesses, s'embarqua dans une cambiada osée en fin de parcours, vogua sur des vagues de circulaires ...la suite hélas. Il fut le même avec Inquemable le bien nommé, un galopeur épique , mais l'épée se montra incertaine qui doutait depuis la dernière injustice .Il ne faut pas passer sous silence le trio de banderilleros de cette cuadrilla: messieurs les deux Molina et Delgado, respect.
Étonnamment il m'a semblé que les novillos matutinaux Fuente Ymbro (5éme excepté) étaient plus... avaient davantage que les noblichons sang bleu Jandilla/Vegahermosa de l'a.midi. Des trois débutants seul Carlos Duran (ovation et O) tira son épée du jeu. JP Sanchez et J Del Alamo l'accompagnèrent, en silence.
Plus de ¾ d'arène aux vêpres, un cheptel qui servit comme on dit, deux matadores en représentation et Ruben Pinar suppléant Perera blessé à Castellon la semaine précédente. Pinar, jeune torero aux dents longues et à la passion chevillée à l'âmet (O, forte pétition) enseigna comment on doit se comporter dans l'arène : il fut digne, il fut torero-torero y compris sous le déluge qui accompagna une seconde faena que la première estocade, bonne pourtant, ne parvint pas à couronner. Le public eut beau agiter, protester Pinar n'est pas encore Ponce. El Fandi emporta aussi un trophée à l'issue de son spectacle de bâtonnets parachevé par une estocade décisive, mais de faena point. Au crédit de David Fandila une époustouflante quatrième paire de banderilles, un quiebro dos aux planches: autre chose que les courses et cavalcades des lots précédents. Pour le reste, il reste peu! Enfin Rivera Ordoñez ! Il arracha une vuelta déroulée aux sonorités des débuts d'extases répartis sur les étagères. A part cela des banderilles sans peine ni gloire, un départ de seconde comparution assis sur le rebord , à côté de la lucarne des caméras de C+, enfin pas grand chose à se mettre dans l'objectif. Quand Rivera Ordoñez se décidera-t-il à être vraiment torero? Qui et comment le déficellera de ses contradictions, contraintes?

Pari gagné le dimanche 21: les fêtes terminées depuis deux jours, l'activité reprise pour ceux qui ont la chance d'en avoir une, la pluie incessante, l'arène pleine, mais surtout, et ici c'est un signe, pleine jusqu'au bout en dépit des horaires des trains de banlieue et de cette satanée gênante pluie écran entre crachin et averse. Ponce (O), Morante (O), El Juli (OO), El fandi (ovation) Castella (OO) Manzanares (ovation) Cayetano (ovation), chacun sait ainsi où est sa place. Ils avaient croisé la route de deux Domecq (un premier renvoyé aux vestiaires), puis Nuñez, Garcigrande, M. Gonzalez, V. del Rio, et encore Garcigrande. Un faible quatrième, un manso -bolide cinquième qui multiplia par trois la dose de piques passant d'une monture à l'autre et les traditionnels autres, mais sous l'eau. Les estocades basses, de plus en plus en usage et ne suscitant aucune réaction firent florès : celle de Sébastien lui coûta le rabo promis, alors que le Juli en perdit un avec une second descabello.

La très longue feria fallera 2010 est un réussite pour Simon Casas production: succès populaire, engagement évident de la plupart des maestros engagés, satisfaction des politiques régionaux, des chroniqueurs locaux, nationaux, et même de certains étrangers pour la considération qui leur fut accordée. Les envoyés de Planète Corrida la vécurent autrement.
J cl lorant-raze

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